Gequis Nathan : Paris – Pointe-à-Pitre, avec escale

Pour cette lettre G du ChallengeAZ, partons sur les traces

Fusilier au 66e régiment d’infanterie de ligne, bataillons de guerre du destinés aux colonies. Fait prisonnier de guerre le 10 février 1810 à la capitulation de la Guadeloupe. Taille de 4 pieds 11 pouces. Nommé Mathieu Gequis d’après son registre militaire, fils de Israel Nathan et de feu Balée. Si le nom des parents laisse peu de doute pour l’époque à Paris sur l’origine juive de la famille, le nom Géquis semble assez improbable, inconnu au bataillon, tout du moins inconnu dans le recensement de la communauté juive de Paris réalisé en 1809. Cette fluidité dans les noms / prénoms est aussi ce qui fait souvent la complexité autant que le charme de la généalogie juive à cette époque.

Registre de Mathieu Gequis dans le 66e régiment d’infanterie de ligne, bataillons de guerre destinés aux colonies (source SHD/GR 21 YC 561)

Quoiqu’il en soit, notre Mathieu Gequis est incorporé au sein du 66e régiment d’infanterie de ligne et se voit affecté aux bataillons destinés aux colonies. Quelle aventure (ou quelle galère !) pour ce gamin de Paris qui n’avait pas du avoir beaucoup l’occasion de dépasser le périph 🙂

Il part sur « La Topaze » et débarque en Guadeloupe le 22 janvier 1809. Mais la situation des Français est catastrophique face aux Anglais qui prennent rapidement l’Ile début 1810. Les soldats français faits prisonniers sont alors envoyés en Angleterre.

Uniforme du 66e de ligne en Guadeloupe (source internet)

J’ai réussi à le retrouver non sans mal la trace de notre Mathieu Gecquis dans les registres de prisonniers anglais, sous le nom de Jeky Nathan. Né à Paris vers 1788, capturé en Guadeloupe en février 1810 alors au 66e régiment d’infanterie : ce Jeky Nathan est sans aucun doute notre Mathieu Gecquis fils de Nathan Israel. Il reste prisonnier jusqu’à la chute de l’Empire en 1814 au château de Portchester dans le sud de l’Angleterre, haut lieu de la détention de Français pendant les guerres napoléoniennes (jusqu’à 8 000 prisonniers !).

Vue de la prison du Chateau de Portchester par le Captain Durrant of the Royal Navy 1810
(© Hampshire Cultural Trust)
Représentation de la vie dans la prison de Portchester Castle.
Registre de prison de Jeky Nathan, né à Paris, fait prisonnier en Guadeloupe au 66e régiment d’infanterie (Source Findmypast)

On retrouve notre soldat dans le recensement des juifs de Paris en 1809. Notre Jeky Nathan est très certainement le Jacob Nathan, soldat, fils de Israel Nathan relevé dans la famille n°100. Le père originaire de Grünstadt en Allemagne est marchand de lunettes. Sa femme (de 28 ans sa cadette donc certainement un remariage) est Esther Mathis marchande de mouchoirs, originaire de Mayence. D’ailleurs la mère de notre Jacob était déjà décédée à cette époque, présentée comme « feue Balée » d’après son registre militaire.

Famille 100 du recensement de la communauté juive de Paris de 1809 (source Genami)

Son père Nathan Israel décède à Paris le 30 novembre 1822 à l’âge de 82 ans, demeurant 12 rue Maubuée. A défaut d’état civil, c’est dans la série DQ8 des archives fiscales des tables de décès et successions qu’on le retrouve. Aucun nom d’héritier n’est précisé et il est inhumé gratis, faute de moyens.

Table des décès et des successions – DQ8 751 vue 103/103 (source Archives de Paris)

Après Paris, la Guadeloupe et l’Angleterre, je perds la trace de notre soldat à son retour en France. Pas plus d’info non plus sur sa fratrie. Dans les registres du 4ème bataillon colonial j’ai trouvé un autre Jecky Nathan de Paris, né vers 1785 et enrôlé volontaire le 27 mars 1806. Bien que les prénoms des parents ne correspondent pas, il se pourrait tout de même que ce soit un frère de notre Jacob Nathan.

extrait du 4ème bataillon colonial
(Source SHD cote 43 YC 220, photo Surnostraces)
Registre des prisonniers français de retour de Guadeloupe
(source SHD GR Yj 11 – photo @Surnostraces)

Peut être s’y cache t il mais je n’ai pas trouvé trace de notre Gecquis / Jecky / Nathan dans cette énorme liasse de soldats prisonniers de retour en France. Faut dire qu’il n’y a absolument rien d’alphabétique, c’est un ensemble de documents hétéroclites constitués au fur et à mesure des retours des différents bateaux qui renvoyaient les prisonniers en France. La trace de notre Nathan Gecquis s’arrête pour l’instant ici.


Pour aller plus loin :

Prisoners of War at Portchester Castle (English Heritage)

Prisoners of war, 1800-1815 (100 titres sur Gallica choisis par la Fondation Napoléon)

La Garde Nationale en Guadeloupe (1803-1815)

2 commentaires

  1. La généalogie juive invite effectivement à beaucoup d’humilité et de souplesse dans le suivi des ancêtres 😉 Leurs noms / surnoms / prénoms peuvent être très variables surtout à cette époque. C’est aussi ce qui fait son charme…

    Ce n’est d’ailleurs qu’en 1808 que Napoléon exige que les juifs se prennent un nom fixe, du coup certains changent carrément de nom à cette occasion. Mais avec un peu d’expérience et en croisant les sources et les indices, ont réussi parfois / souvent à suivre ces ancêtres

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